Lightnin' Hopkins

"Poor" Lightnin', comme il s'appelait lui-même à la troisième personne est un grand innovateur du Texas blues, où il est né le 15 mars 1912, un explorateur de la guitare électrique, un compositeur hors pair, un magnifique bluesman. Il est pris en charge par son cousin, l'aveugle Texas Alexander qui l'emmène avec lui sur la route dans les années 30. Hopkins rencontre ainsi les bluesmen texans, Little Hat Jones, Funny Paper Smith et le pianiste Thunder Smith avec lequel il fait équipe sous le surnom de Lightnin' & Thunder (l'éclair et le tonnerre). L'influence de Blind Lemon Jefferson est très présente sur son jeu de guitare qui fait alterner les basses appuyées et les arpèges. Mais Hopkins modernise ce style, le rend plus fluide, encore plus délié, ce qui lui permet d'être un des tout premiers bluesmen à véritablement utiliser les ressources de la guitare électrique : puissance mais aussi écho, vibratos, saturation.

 

Ces talents de guitare ainsi qu'une capacité à composer d'extraordinaires blues-sur-le-champ, à propos de scènes de la vie quotidienne, d'évènements personnels ou bien de sujets d'actualité, valent à Lightnin' Hopkins une grande popularité auprès des noirs du Texas et de la Californie à partir de 1946 lorsqu'il enregistre une grande quantité de disques. De grands succès comme Short-haired woman, Lonesome home, Tim Moore's farm, Coffee blues, Hello Central sont en plus des blues superbes, à l'humour dévastateur et d'une inspiration rarement égalée.

 

Mais son style de country blues texan électrique qui eut beaucoup d'impact chez les travailleurs noirs originaires de cet Etat, passe de mode aux alentours de 1953, son public préferant alors des formes de blues sophistiquées comme celle de leur compatriote T-Bone Walker. Lightnin' traverse alors une période difficile, ne jouant plus que dans des petits bars de Houston, son fief.

 

Jusqu'en 1959, lorsque l'ethnomusicologue Sam Charters le redécouvre et l'enregistre pour le label Folkways à destination du public blanc de blues revival. Lightnin' Hopkins saisit cette occasion : il est présent dans les grands festivals folk, dans les universités américaines, participe à une tournée de l'American Folk Blues festival en Europe. Il enregistre des dizaines de microsillons entre 1960 et 1966 - jusqu'à trois par semaine ! - aussi bien à New York qu'en Californie. Son talent est tel que rares sont les disques qui ne témoignent pas d'une inspiration constante.

 

Mais ayant une peur panique de l'avion, et sans doute lassé de cette nouvelle carrière qui le coupe de son public privilégié du ghetto de Houston, il refuse toute nouvelle tournée à partir de 1969, passant les dernières années de sa vie dans son quartier du 3ème arrondissement de Houston dont il est le bluesman et le porte-parole attitré. Il n'enregistrera plus que sporadiquement pour Chris Strachwitz, un de ceux qui a su le mieux capter la quintessence de la musique de "Poor" Lightnin'. Sa réputation internationale finira par attirer l'attention des édiles de sa ville. Peu avant sa mort, qui surviendra le 30 janvier 1982 à Houston, il se verra remettre les clés de Houston par le maire !