Antoine

En 1965, les beatnicks sont à la mode. Dylan est leur chantre. Pye a lancé avec succès Donovan. En France, l'Agenois Christian Fechner, ancien illusioniste devenu directeur artistique, tente une opéaration similaire avec Antoine, fils d'ingénieur (Antoine est né dans un lieu très exotique, à Tamatave, Madagascar, où son père travaillait aux Travaux Publics de ce qui s'appelait alors la France d'Outre Mer) et étudiant à Centrale. Il fait appel aux Problèmes pour l'accompagner. Cheveux longs, Levi's rapiécé, parka de surplus, guitare sèche, harmonica... rien ne manque à la panoplie.

Après La Guerre, en décembre 1965, au ton relativement convenu, il abandonne l'uniforme pour des tenues colorées (la fameuse chemise à fleurs) et joue de son insolence pour se forger un public. Il triomphe, en janvier 1966,avec Les Elucubrations d'Antoine qui raille Johnny Hallyay et l'accordéoniste de bal musette Yvette Horner, déclenchant moul pomémiques. Hallyday lui répond avec Cheveux longs idées courtes. Ronnie Bird arbitre : La chanson a du bon lorsqu'on pense au fric.

Accompagné par les Problèmes, Antoine publie son premier album, Antoine, excellent équivalent du rock garage qui sévit alors dans des caves obscures aux quatre coins des Etats Unis.

Il part en tournée, en février 1966, avec Chuck Berry, Ronnie Bird, Memphis Slim et Pussy Cat. Retrouvant les Problèmes, il réalise un autre périple en compagnie des Brummels, Cédric & Cléo, Bernard Laféraud et les sharks. Le chanteur et ses musiciens, habillés par Courrèges, remplissent l'Olympia, en mai 1966, partageant l'affiche avec Karine, Ferré Grignard, les Peels et Silkie. Le message d'Antoine est clair : Je dis ce que je pense et je vis comme je veux, titre inclus dans le 33 tours Antoine rencontre les Problèmes.

Antoine

Je reprends la route...

1966                              CD

1967                                CD

Influencé par le psychédélisme, mais toujours moqueur, il concocte Un éléphant me regarde. Enregistrant en différentes langues, Antoine connaît un certain succès à l'étranger, notamment en Italie, où il décroche un tube grâce à Pietre. Il participe au festival de San Remo (1967, 68 et 69). Après Votez pour moi (septembre 1966), il est victime d'une dépression nerveuse et se sépare de Fechner. Les fans sont surpris de le retrouver en février 1967, en costume, les cheveux plus courts et arborant moustache sur la pochette de son deuxième album, Je reprends la route demain. L'évolution musicale est évidente à l'écoute de Je l'appelle Cannelle, Juste quelques flocons qui tombent ou de la reprise de Chanson pour l'Auvergnat.

A l'Olympia, il est soutenu par le Panier de crabes de Herbert Léonard. L'influence de Dylan est encore perceptible dans Madame Laure Messenger, Claude , Jérémie et l'existence de Dieu, titre fort du troisième LP dont la pochette rappelle les disques de Donovan. A l'instar des Beatles, Antoine est perméable à la mode rétro et à différents folklores, notamment sud-américains, comme le démontre Bonjour Salut, son quatrième album. Il enregistre même un duo avec Georgette Plana, Je t'offre un verre, initiative qui réduit sa crédibilité rock à zéro. Visiblement, il n'en a cure. Après avoir repris en 1971 Hot Love de T.Rex, chanté l'opérette Dédé puis My-Ding-A-Ling d'après Chuck Berry, et ayant touché à un peu tous les styles, il préfère naviguer dans le Pacifique. En 1974, Groseille fait regretter qu'il ne se consacre pas plus souvent à de vrais albums. Il est évidemment sincère quand il chante Touchez pas à la mer. Il décrit ses débuts dans 1965-Roman paru en 1987. Ayant commis de nouvelles versions de ses premiers succès, sont le réussi Qu'est-ce qui ne tourne pas rond, il retrouve les Problèmes pour un passage à l'Olympia en février 1988. On le voit parfois à la télévision vantant un livre ou une vidéo rapportés de ses voyages, ou défendant un simple occasionnel comme sa version de What A Wonderful World.

En 1966, Antoine a suscité d'innombrables imitations. Son apport au rock français devient par la suite moins évident sauf quand Indochine réactive Un Eléphant me regarde sur scène ou que Zéro de conduite chante La Guerre. Sa forte personnalité, sa bonne humeur permanente et sa voix caractéristique font désormais partie du paysage télévisuel.