Count Basie

William Basie est né à red Bank, près de New York, en 1904. Son éducation jazzistique se déroule aux côtés des accompagnateurs du cinéma muet de l'époque et parmi les pianistes stride de Harlem : Luckey Roberts, James P. Johnson, Willie "The Lion" Smith, et le plus adoré de tous, Thomas "Fats" Waller. Les premiers travaux le conduisent vers le monde du vaudeville; en 1927, la compagnie à laquelle il appartient fait faillite au milieu d'une tournée, juste à Kansas City. Le pianiste décide, sans doute guidé par un sixième sens, que c'est là que commence son avenir et y pose ses valises.

Swinging the blues

April in Paris

Complete Atomic Basie

and The Kansas City 7

Prime Time

1938                           CD

1956                           CD             

1957                           CD

1962                            CD

1977                            CD

 

Dans la capitale du Missouri, véritable laboratoire de la musique noire en gestation, de nombreux clubs accueillent des musiciens en tournée, qui se confrontent aux locaux en d'interminables jam-sessions. Progressivement, se met en place un style, fondé sur le blues qui va influencer le cours du jazz : l'égalité des riffs et l'égalité des quatre temps, le four-beat. Enthousiasmé par la musique des Blue Devils, dirigé par le contrebassiste Walter Page, représentant de cette tendance avec l'orchestre de Bennie Moten, William Billl Basie, alors accompagnateur de films muets, écrit à Page ; réponse : en 1928, il devient pianiste de l'orchestre, puis, un an plus tard, celui de Bennie Moten, jusqu'à la mort de ce dernier en 1935.

Après quelque hésitation, Basie finit par s'associer au saxophoniste Buster Smith pour diriger le Buster Smith and Basie Band of Rhythm au Club Reno de Kansas City. C'est au cours d'une retransmission radiophonique qu'un speaker attribue à Basie le titre de "Count" (compte) et que le critique John Hammond le découvre : "je ne pouvais en croire mes oreilles … Basie avait développé un style d'une extraordinaire économie. En quelques notes, il disait tout ce que Waller et Hines pouvaient dire pianistique ment, usant d'une ponctuation parfaite - un accord, une note -, capable de stimuler des souffleurs et de leur faire atteindre des sommets jusque-là inaccessibles. Entre 1932 et 1936, Basie avait découvert l'efficacité de la simplicité"

Hammond aide Basie à étoffer son orchestre, lui procure des engagements au Grand Terrace Café de Chicago et au Roseland Ballroom de New York et à enregistrer en Octobre 1936 le Jones-Smith Incorporated qui comprend Carl Smith (tp) Lester Young (pour son premier enregistrement), le Count, Walter Page, Jo Jones, et, pour deux titres, le chanteur Jimmy Rushing avec lequel Basie s'était lié d'amitié chez les Blue Devils.

En 1937, Basie engage le guitariste Freddie Green (1911-1987), qui restera pendant cinquante ans le guitariste de l'orchestre, constituant avec Page et Jones la All American Rhythm Section. La formidable machine à swing est en marche et, en pleine "Swing Era", s'impose aux côtés de celle d'Ellington, de Benny Goodman et de Tommy Dorsey.

Entre 1936 et le début de la guerre, l'équipe est relativement stable et une quantité impressionnante de chefs d'œuvre est gravée (The American Decca Years). Citons les plus grands solistes de cette première période : Buck Clayton, Harry Edison (tp), Benny Morton, Dicky Wells (tb), la formidable sections d'anches : Chu Berry, Hershel Evans, Buddy Tate, Earl Warren, Lester Young, les chanteuses Billie Holiday et Helen Humes, et évoquons quelques titres: (Jumpin at the Woodside), (One O'Clock), (Every Tub) …, ainsi que les arrangeurs Eddie Durham, Jimmy Mundy, Buster Harding … Count Basie reçoit une somme dérisoire pour ces enregistrements chez Decca : 750 dollars qui achètent par la même occasion la totalité de ses droits postérieurs. Dans cette optique, ils produisent une certaine inquiétude, mais du point de vue musical, ils fonctionnent comme au premier jour. Il est même possible de prétendre qu'à travers ces interprétations, Basie est en train de construire les fondations du jazz moderne, au sens le plus exact du thème : un jazz entièrement admissible de par lui-même, sans nécessité de discriminations auditives ni d'intermédiaires, totalement libre d'adhésions imputables à des modes ou des limitations d'une autre époque.

Le départ de Lester Young en 1940, ceux de musiciens enrôlés dans l'armée créent un flottement dans l'orchestre que Basie dissout en 1950. Dépassant la dénommée "crise des big bands", alors que presque aucune grande formation ne put être sauvée d'une dissolution transitoire ou définitive, Count Basie n'hésite pas à remontée la sienne. A partir de 1952, plusieurs groupes "basiens" virent le jour, tous réunis autour d'une nouvelle tendance aussi bien musicale que professionnelle ; la recherche, et par conséquent, la rencontre de la perfection. Le résultat est étonnant, surtout après le réajustement de la section rythmique et l'incorporation d'Ed Jones et de Sonny Payne, ajoutés à Count Basie et à l'indispensable Freddie Green. Une comparaison avec le groupe qui parvint à son apogée vers 1940 semble inévitable : cela sonne beaucoup mieux… mais n'a pas les solistes de celui-ci. Il est certain que Lester Young et Herschel Evans sont irrépétibles qt que le dénommé jazz de Kansas City n'existe plus, mais l'adoption du rôle d'arrangeur (Neal Hefti) comme figure prépondérante, loin de combler les absences, donne toutefois le signal d'une nouvelle époque, aussi fructifiante que la classique. Les disques que Basie enregistrent pendant cette époque et jusqu'en 1962 sont d'une qualité supérieure; April in Paris, The Complete Atomic Basie, Kansas City 7 en sont assurément les pièces les plus notoires.

Tournées mondiales, accompagnement de stars (Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan, Frank Sinatra), invitations multiples (Roy Eldridge, Dizzy Gillepsie, Milt Jackson), festival (Antibes, Montreux), engagement de jeunes musiciens et d'autres arrangeurs (Eric Dixon, Oliver Nelson, Chico O'Farrill, Sam Nestico), duos de piano avec Oscar Peterson. Devenu, à côté d'Ellington, une véritable institution : l'orchestre continue de swinguer comme aux premiers jours jusqu'à la disparition (1984) de son chef … et même après, puisque Frank Foster perpétuera la tradition de cette formation la plus porteuse de swing à l'état pur, dont le nom résonne comme un symbole : COUNT BASIE