Né
à 1919 à Dallas, il fut le pionnier des guitaristes bop. En dépit de sa trop
courte carrière - environ cinq ans, car il meurt de tuberculose à l'âge de
vingt-six ans -, Charlie Christian
aura notamment su imposer la guitare électrique comme instrument soliste (elle
avait avant lui un rôle rythmique dans les grands orchestres où elle était
rarement employée en solo, à cause de son faible volume sonore), il aura
influencé tous les guitaristes (Django mis à part) qui suivront et participé
avec Monk, Gillepsie et Parker et
quelques autres aux séances qui, dans les clubs de Harlem en 1941, donneront naissance
au be-bop.
On
retiendra de sa façon de jouer le renouvellement des conceptions de
l'accompagnement et de l'improvisation, l'équilibre de ses innovations
harmoniques (accords de passage, fréquent usage de la septième mineure) et de
ses audaces mélodiques, un emploi du phrasé legato, un "style
saxophone" peut-être hérité de Lester
Young. Dans ses solos, il insistera sur une note déterminée, développera
des riffs gorgés de swing, assurera une mise en place rigoureuse (il marque les
quatre temps avec souplesse), que ponctuent parfois des breaks impressionnants.
Sa sonorité, percutante à l'attaque mais toute en rondeur, inimitable,
reconnaissable dès les premières notes, reste l'une des plus belles de
l'instrument.
C'est
à la contrebasse que Christian débute dans le métier de musicien, après s'être
initié à la trompette, au saxophone et au piano ; devenu guitariste, il
sillonne le Middle West dans divers orchestres. En 1937, il rencontre le
guitariste Eddie Durham, qui, le
premier, avait utilisé la guitare éléctrique amplifiée dans l'orchestre de Jimmie Lunceford (1935-1937). La
pianiste May Lou Williams,
impressionnée par le jeune prodige, téléphone au producteur John Hammond, qui
le recommande à Benny Goodman qui
l'engage ; il restera dans l'orchestre de 1939 jusqu'à sa mort, participants à
de nombreux concerts (le second From Spirituals to Bop) et séances
d'enregistrements en big band, sextette (Waiting for Benny du 13 mars 1941) ou
quintette.
Ses
interventions dans les groupes du clarinettiste lui apportent la notoriété
(premières places aux référendums) ; sitôt les concerts terminés, il se
précipite au Monroe's Uptown House ou au Minton's Playhouse où l'attendent ses
amis boppers, pour d'interminables jam-sessions. Christian est le musicien le
plus en avance, le plus original et adulte de tous ceux qui s'y réunissent;
fort malheureusement, il n'aura que l'occasion de contribuer au printemps du
jazz moderne. Fatigué, il entre à l'hôpital en juillet 1941 ; on croit à une
guérison rapide, mais il meurt quelques mois plus tard au sanatorium municipal
de Seaview. Le jazz venait de perdre celui qui, avec Django Reinhardt, demeurera un modèle pour tous les guitaristes des
années à venir.
Les
enregistrements de The
Genius Of The Electric Guitar
proviennent dans leur totalité de ses séjours dans les groupes de Benny Goodman
et se rapprochent, malheureusement beaucoup, de l'ensemble de son légat
discographique. (Seven come eleven) renferme les trois éléments principaux de
la majeure partie de ses improvisations : l'instance - aux effets climatiques -
sur une note déterminée, l'usage du riff et un généreux phrasé riche en astuces
mélodiques. Mais le plus célèbre de ces registres, et le seul où on l'écoute
avec un grand orchestre, est (Solo Flight) en mars 1941. Ici, Christian
commande et vole littéralement autour des riffs administrés par le groupe de
Goodman et l'arrangement de Jimmy Mundy, en démontrant, après les tentatives
précaires de Durham, et de Floyd Smith avec Andy Kirk, que la guitare est capable de fonctionner
comme un soliste d'exception dans n'importe quel contexte.