John McLaughlin
Né le 4 janvier 1942 à
Doncaster (Grande-Bretagne), John McLaughlin est le fils d’une violoniste. Il
débute le piano à l’âge de quatre ans, puis commence deux ans plus tard à
s’intéresser à la guitare, qu’il apprend en autodidacte. Adolescent, il joue
dans le groupe Professors of Ragtime, avec le banjoïste Pete Deuchar,
puis décide de tenter sa chance à Londres. Dans la capitale britannique,
McLaughlin commence à tracer sa route en jouant dans des clubs et participe à
des groupes de rock et de blues. Au début des années 1960, alors que la scène
musicale britannique dans son ensemble se réveille, il multiplie les
collaborations avec des ensembles de blues et de jazz (Georgie Fame and
the Blues Flames, Alexis Corner, Graham Bond Organization) ; il
effectue un séjour de six mois en Allemagne, où il joue au sein de la formation
de Gunter Hampel.
En 1968, John McLaughlin
décide de son consacrer à des projets personnels : avec John Surman
(saxophone), Tony Oxley (batteur) et Brian Odges (basse), il
fonde son premier groupe et enregistre l’album Extrapolation.
En 1969, le batteur américain Tony Williams, qui vient de quitter Miles
Davis pour fonder sa propre formation (Lifetime), se voit conseiller
le brillant guitariste anglais. Contacté, John McLaughlin traverse l’océan pour
rejoindre le groupe de son collègue américain, avec qui il enregistre les
albums Emergency (1969) et Turn It Over (1970). Réclamé par Miles Davis en
personne, John McLaughlin refuse dans un premier temps, tant il apprécie
l’expérience de Lifetime.
Après la séparation du
groupe, le Britannique finit par travailler avec Miles Davis, sur plusieurs
albums , dont In a Silent Way et Bitches Brew : sur ce dernier opus figure, même
un morceau intitulé, tout simplement, John McLaughlin.
Voyant grandir sa réputation de guitariste talentueux et polyvalent, celui-ci
multiplie les séances avec des musiciens de jazz comme de rock, collaborant
entre autres avec les Rolling Stones et puisant ses sources
d’inspiration aussi bien chez Jimi Hendrix que chez Charlie Mingus.
En 1970, John McLoughlin
passe chez Douglas Records pour son premier album solo, Devotion. Mais les choses sérieuses commencent
vraiment avec son second album, My Goal’s Beyond:
converti à l’hindouisme suite à sa rencontre avec le gourou Sri Shinmoy
(il choisit à ce moment de prendre le nouveau prénom de Mahavishnu), John
McLaughlin opère dans cet album acoustique un mélange, au syncrétisme
typiquement seventies, de jazz et de musique traditionnelle indienne.
En 1971, avec le
violoniste Jerry Goodman, le claviériste Jan Hammer, le bassiste Rick
Laird et le batteur Billy Cobham, il fonde le groupe Mahavishnu
Orchestra, qui se fait rapidement remarquer par ses solos impressionnants,
ses capacités d’improvisation et ses audacieuses fusions musicales, d’une rare
complexité technique, dès le premier album The
Inner Mounting Flame, dont les titres des morceaux fleurent bon un
spiritualisme typique des années 1970 : Meeting of the
Spirits, A Lotus on Irish Dreams, The Dance of Maya… En 1973 sort un album live, Between Nothingness and Eternity, considéré comme
l’un des sommets de la production musicale du groupe.
De son côté, John
McLaughlin co-signe l’album Love Devotion Surrender,
avec Carlos Santana, autre illustre adepte de Sri Shinmoy. Les relations
entre les membres du groupe sont cependant aussi difficiles que leurs
expériences musicales sont audacieuses et les compères se séparent au bout de
trois albums : John McLaughlin relance l’année suivante le Mahavishnu
Orchestra, avec de nouveaux membres, considérant qu’il s’agit là d’un groupe
conforme à ses souhaits, le premier n’en étant qu’un brouillon. Trois albums se
succèdent durant les années 1970 : Apocalypse
(réalisé dans le cadre d’une ambitieuse collaboration avec un orchestre
symphonique), Visions of the Emerald Beyond
et Inner Worlds.
Mais l’esprit de
McLaughlin est ailleurs, John McLaughlin cédant de plus en plus la place à
Mahavishnu.
Il fonde avec le
violoniste et compositeur indien Lakshminarayanan Shankar, et trois
autres musiciens également originaires d’Inde, un nouveau groupe : Shakti.
La naissance de ce nouveau projet conduit à la dissolution du nouveau
Mahavishnu Orchestra. Le premier album, Shakti with
John McLaughlin (1975) se signale par une volonté de fusion des
différentes traditions musicales indiennes et de la ryhtmique du jazz : le quintette
Shakti, pionnier de l’Indian Fusion, réalise de nombreuses tournées
entre 1975 et 1977, avant de se séparer.
En 1979, McLaughlin
forme, avec le guitariste de flamenco Paco de Lucia et le jazzman Larry
Coryell, un nouveau groupe, baptisé le Guitar Trio, qui tourne
régulièrement. Une autre formation, le Trio of Doom, ne vit que le temps
d’un concert. Parallèlement, l’Anglais se consacre à ses projets solo, signant
notamment l’album Electric Guitarist,
qui signe son retour à un jazz-rock plus traditionnel après sa période hindoue.
En 1980, il collabore avec la guitariste française Katia Labèque pour
l’album Music Spoken Here. Visant à la fois le public new age et les amateurs
de jazz authentique, John McLaughlin cumule des prestations expérimentales avec
des hommages aux racines de la musique américaine, apparaissant notamment aux
côtés de Dexter Gordon dans le film Autour de minuit, réalisé par Bertrand
Tavernier.
En 1984, il reforme son
groupe fétiche, le Mahavishnu Orchestra, avec qui il signe deux albums.
Ambitieux et ouvert à toutes les expériences musicales, il enregsitre le
Mediterranean Concerto en 1988 avec le Los Angeles Philharmonic et le London
Symphony Orchestra. Le guitariste n’en oublie pas pour autant la scène et
tourne avec un nouveau groupe, le John McLaughlin Trio, formé avec Kai Eckhardt
(basse) et Trilok Gurtu (percussions), qui enregistre deux albums, Live at the
Royal Festival Hall et Qué Alegría. C’est ce dernier opus qui lui donne
l’occasion, au début des années 1990, d’une tournée en compagnie de son quartet
(le bassiste Dominique DiPiazza ayant rejoint Eckhardt et Gurtu).
En 1993, il fonde un
trio avec orgue, The Free Spirits. En 1996, paraît un album solo faisant office
de bilan : The Promise, où il est entouré de grands noms du jazz (Dennis
Chambers, Jim Beard…). Présent, comme toujours, sur plusieurs fronts, il monte
en 1997 une formation en hommage à Shakti, accompagné de Zakir Hussain, ancien
membre du groupe originel (L. Shankar est remplacé par le joueur de mandoline
U. Shrinivas), et de nouveaux musiciens indiens.
Continuant de multiplier
les projets, John McLaughlin s’illustre sur les fronts du hard bop et du jazz
fusion, écrit une nouvelle pièce classique, Thieves
and Poets, utilisée pour les ballets de Monte-Carlo et met le pied
dans l’univers du multimédia en sortant une série de trois DVD sur
l’improvisation musicale. A l’âge où bien des vétérans de la musique se
reposent sur leurs acquis, le jazzman du Yorkshire choisit l’indépendance et
l’innovation en quittant, en 2007, le label Universal, pour rejoindre Abstract
Logix, un éditeur basé sur le web, actif sur le front du rock progressif, de la
world music et des musiques indépendantes en général.
En 2008, il sort l’album
Floating Point, à nouveau marqué par
l’alliance entre les musiques occidentale et indienne. Toujours employé à
lancer de nouveaux projets, à former de nouveaux ensembles musicaux pour lancer
des tournées conceptuelles, à ressortir du placard des enregistrements et des
projets oubliés pour les proposer au public, John McLaughlin fait figure
d’inclassable dans l’univers de la musique, aussi attaché aux racines du jazz
qu’à son mariage avec les mondes artistiques les plus inattendus. A la fois
musicien ésotérique et passeur culturel, le jazzman des sixties est une mondialisation
artistique à lui tout seul.