Très tôt, le jeune
Christian, fils du pianiste Maurice Vander, côtoie des jazzmen
importants comme Elvin Jones, Kenny Clarke ou encore Chet
Baker, qui lui offre sa première batterie. A l’âge de treize ans, il
découvre John Corltrane qui restera le grand choc musical de sa vie et
exercera une influence fondamentale sur sa trajectoire à venir. Parallèllement,
il écoute Stravinski, plus particulièrement Le Sacre du printemps
et les Noces, Bartok, Wagner, ainsi que les ténors de la
soul comme Ray Charles, Sam & Dave, James Brown ou Marvin
Gaye. L’ensemble de ces découvertes dessinera l’horizon musical du futur
Magma.
En attendant, Vander
forme son premier groupe, les Wurdlaks, plutôt axé sur le
rhythm’n’blues, puis après une première séparation, les Chinese, où il
joue ses premières compositions dont l’une a pour titre Nogma. Après la mort de Coltrane en 1967, Christian Vander décide
de s’exiler en Italie, où il joue, pendant plusieurs mois, dans les clubs avec
différentes formations de jazz et de rhythm’n’blues. Après une nuit d’extase à
Turin, il décide de rentrer à Paris et fonde, début 1969, le groupe Magma en
compagnie de Laurent Thibault aux claviers, Francis Moze à la
basse, Zabu au chant et René Garber au saxo, surnommé le
Stûhnder, auxquels viendront très vite s’adjoindre Claude Engel à la
guitare, François « Faton » Cahen aux claviers, Jacky Vidal
à la basse et Klaus Blasquiz au chant, un des piliers du groupe. Vander
a définitivement renoncé au jazz pour une musique binaire, une sorte de
jazz-rock très originale sous l’influence de Coltrane et Stravinski, marqué par
une imagination et une énergie rhythmiques tout à fait exceptionnelles.
Parallèlement,
il forge une langue nouvelle, le « kobaïen » (issu de la planète
imaginaire Kobaïa), dans laquelle il chante et s’exprime. L’apparition de Magma
est une petite révolution dans l’univers timide de la pop music française; et
événement d’abord confidentiel, il finira par avoir un impact immense. En mai
1970 paraît le premier (double) album du groupe, Kobaïa,
auquel font suite un premier concert à la Gaîté Lyrique et, très vite,
une première apparition à la télévision dans l’ émission de Denise
Glaser, Discorama. Le groupe, austère, dur, sans concession,
volontiers convulsif, choque et détonne.
Peu à peu, Magma affirme
sa personnalité et gagne un auditoire de plus en plus important, en dépit de
concerts, ou grâce à eux, souvent tumultueux et grâce à des albums à thèmes
denses et cohérents comme 1001 Degrés centigrades
(1971), Mekanïk Destruktiv Kommandöh
(1973), sans doute l’œuvre majeure du groupe, ou le très réussi Kohntarkösz (1974). En 1972, Magma s’adjoint les
services du manager Sergio Gomelsky, fait une apparition dans le film de
Jean Yanne, Moi y’en a vouloir des sous.
Tout au long des années
70, et avec des formations diverses où se succèdent notamment le violoniste Didier
Lockwood, les saxophonistes Yochk’o Seffer et Teddy Lasry, le
pianiste Michel Graillier ou le bassiste Bernard Paganotti, Magma
irrite ou fascine par son sens du rituel, la puissance symbolique et mystique
d’un univers aux relents ésotériques parfois discutables, la violence
tellurique de sa musique, mais aussi par la personnalité de son leader, tout à
la fois grand batteur, compositeur inventif, chef d’orchestre autoritaire,
gourou controversé et souvent agaçant.
En 1973 le bassiste Jannick
Top, un fan du groupe, en devient un des éléments moteurs du groupe. La
même année, la formation gagne une reconnaissance internationale en se
produisant au festival de Newport en compagnie des frères Brecker, Michael et
Randy. C’est l’occasion pour Christian Vander de retrouver, après bien des
années, un de ses maîtres, Elvin Jones, le mythique batteur de Coltrane.
La
formation de Magma des années 1973-1976 connut un succès international avec la
création de l'œuvre majeure de Christian Vander la trilogie : Theusz Hamtaahk comportant trois mouvements
(premier mouvement : Theusz Hamtaahk, second
mouvement : Ẁurdah Ïtah, troisième
mouvement : Mekanïk Destruktïw Kommandöh).
Plus tard l'album Köhntarkösz a connu également du succès.
Néanmoins, la formation de Vander, souvent étiquetée
"rock-progressif", n'a jamais connu le succès commercial d'un Genesis
ou d'un Yes.
On peut constater dans
les nouvelles compositions à partir de 1978, l'apparition d'influences soul,
rhythm and blues, voire funk et chant du leader-batteur-compositeur, que l'on
trouve dans les albums : Merci, Attahk ainsi que dans le live à Bourges (1979) et le live à Bobino (1981).
Néanmoins, à partir de
1976, une année qui marque notamment le départ de Jannick Top, Christian Vander
prend un certain recul par rapport à Magma. Les anciens membres du groupe
disséminent sa musique en de multiples formations comme Zao, Art Zoyd,
Weidorje ou Nefesh Music. Vander lui-même forme en 1979 Alien
Quartet, qui deviendra par la suite le Trio Vander, avec Michel
Graillier et Alby Cullaz, un groupe où il joue plus particulièrement
de la batterie, instrument qu’il abandonne dans le cadre de Magma, où il se
consacre surtout au chant et aux claviers, après le départ de Klaus Blasquiz
en 1980.
Le
groupe sera mis en sommeil à partir de 1983, au profit d'Offering, du
nom d’un des derniers morceaux de Coltrane, formation acoustique laissant une
plus grande place à l'improvisation et aux influences d'un jazz
"Coltranien". En 1986, Christian Vander crée le label Seventh
Records, qui lui permet bientôt de rééditer en CD l’intégrale de ses
enregistrements. Depuis 1994, il dirige Welcome en compagnie de Simon
Goubert, tandis que Magma reprend bientôt du service sous le nom Les
voix de Magma. En Octobre 1995, Magma fête ses vingt cinq ans à
Epinay-sur-Seine avec, en première partie, une chorale de cent enfants qui
chante les compositions de Christian Vander.
Aujourd’hui, Magma, formation dont l’importance historique est indéniable, est de nouveau en vie comme un phénomène qui renaît perpétuellement de ses cendres sous l’impulsion toujours renouvelée de son démiurge. D'ailleurs,à l'occasion du 40e anniversaire du groupe, une tournée est prévue en 2009. Vander et ses musiciens se produiront du 12 au 14 février à Paris, puis partiront en province, en Allemagne et même au Japon.
Magma a été le berceau
de nombreux musiciens de jazz Français. On peut citer le violoniste Didier
Lockwood, les guitaristes Claude Engel, Claude Olmos, Gabriel
Federow, Marc Fosset et Jean-Luc Chevalier (actuel guitariste
du groupe Tri yann), les bassistes Jannick Top, Bernard
Paganotti, Guy Delacroix, Francis Moze, Michel Hervé, Dominique
Bertram, Marc Eliard ainsi que René Morizur et Rémy
Sarrazin (qui feront notamment partie des Musclés), les claviers Benoît
Widemann, Michel Graillier, Gérard Bikialo, François Cahen
(leader actuel du groupe Zao), Patrick Gauthier, Jean Pol
Asseline et Jean Pierre Fouquey, les saxophonistes Teddy Lasry,
Didier Malherbes, Yvon Guillard, René Garber et Jeff
Seffer, les trompettistes Louis Toesca et Alain Guillard, le
chanteur Klaus Blasquiz, la chanteuse Stella Vander, les voix d'Isabelle
Feuillebois, de Maria Popkiewicz, de Liza de Luxe, de Guy
Khalifa, les batteurs et percussionistes Doudou Weiss, Simon
Goubert et François Laizeau, etc.
La musique de Magma, aux
accents parfois martiaux accompagnée d'une rythmique puissante ne correspond
pas au rock issu des mouvements hippies de son époque. Magma est avant tout un groupe
de scène, la force qu'il dégage s'apparente à une forme de transe, singulière,
énergisante et maîtrisée. Le jeu de Christian Vander, fortement influencé par
le style d'Elvin Jones (batteur de Coltrane), est basé sur l'art du
contre-temps.
Selon Christian Vander,
la musique de Magma est une musique de l'instant, dont les disques ne sont que
des témoins[réf. Dans l'univers imaginaire du groupe, elle a pour origine la
Zeuhl, qui est « une sorte de matériau spirituel en vibration qui aurait
mémorisé tous les sons et tout ce que l'on peut capter ou concevoir dans notre
esprit ». Le terme de Zeuhl a été utilisé par la suite pour désigner un courant
musical qui regroupe des groupes tels que Eider Stellaire, Xalph,
ou encore des formations comme Univers Zéro, Zao,Art Zoyd et Weidorje.