Calvin Russell

Il est un de ces personnages, semi-imperturbables, dont l'identité musicale et l'intégrité artistique sont difficiles à chahuter, mais qui demeurent ô combien faciles à manoeuvrer par excès de gentillesse. Après toutes ces tournées, ces fans qui s'amassent, ces disques qui se sont vendus par dizaines de milliers, le bonhomme est resté lui-même.

"Mes chansons s'inspirent de l'histoire de ma vie. Une vie qui a ressemblé par instants à un revolver chargé, et à d'autres à celle d'un pauvre gars dont la voiture a de mauvais freins."

Authentique songwriter et chanteur original country-blues, musicien précoce et desperado de l'Ouest américain et sans attaches, né à Austin en 1948, le sixième de neuf enfants, Calvin passe son enfance dans un restoroute dont son père est le cuisinier et sa mère la serveuse. A 12 ans, il est le guitariste rythmique d'un groupe de jeunes et bricole des "hot rods" à un âge "où les mômes font de la bicyclette". Envoyé au centre de redressement pour des broutilles, ce "renégat" sillone le Texas au guidon d'un Harley. Emprisonné dix ans pour trafic de marijuana, il revient à Austin où il essaie en vain d'intéresser le milieu musical.

En 89, Patrick Mathé le découvre et le signe sur son label indépendant français New Rose. Son dépouillement instrumental, ses thèmes nonchalants et les échos ZZ Top de A Crack In Time tombent à pic. Le Jack Kerouac alcoolique du blues trouve son public, s'impose peu à peu et confirme avec l'épatant Sounds From the Fourth World. Ce premier chef-d'oeuvre total déboule avec notamment One Meat Ball, Rockin' The Republicans (emprunté à son pote Minus) ou encore Crossroads. Dans les notes de pochette, ce très beau paragraphe expliquant l'origine du titre de l'album : " These songs are stories from the 4th world. That world that exists in the shadows and cracks of the 1st world. It's where a lot of us are, maybe you, too. Past the 55th circle of darkness you make your own rules. You can see out from in but you cannot see in from out..."

Consécration en 92 avec Soldier produit par le vétéran Jim Dickinson (Big Star, Alex Chilton, Ry Cooder, Flamin' Groovies). Le très rock Dream Of The Dog en 95 présente The Answer ?, l'une de ses réussites, et une version dantesque de It's My Life des Animals. En 97, C.R. est plus convenu, malgré l'une des rares reprises de son répertoire, Mr. Mudd And Mr. Gold, de Townes Van Zandt. On lui doit une version de All Along The Watchtower de Bob Dylan sur le mini CD live This Is Your World en 92.

Il enregistre Sam en 98 (avec J. Dickinson et son fils guitariste, Luther Dickinson) aux studios Muscle Shoals (Alabama) avec l'increvable section rythmique Roger Hawkins-David Hood et revisite l'inusable Somewhere Over The Rainbow. Le 29/1/99, il inaugure son club, le bien nommé The Roadhouse-C.R. Music Bar, à Conthey en Suisse (31, rue des Rottes).