Youssou
N'dour est né le 1er octobre 1959 à Dakar au Sénégal. Son père Elimane est
ouvrier. Sa mère Ndèye Sokhna Mboup est griotte. Dès son plus jeune âge, il préfère
la musique à ses études. Mais ses parents sont intraitables et désirent le voir
réussir. Pourtant à onze ans, il décide d'intégrer la troupe théâtrale Sine
Dramatique. Remarqué par un musicien du Dounia Orchestra, Pacheco,
celui-ci le recommande auprès du Diamono et particulièrement de Charlie
Diop. Il entre au sein du groupe et attend patiemment son heure de gloire.
Le véritable déclic se produit alors qu'il n'a que treize ans. A l'occasion de
la mort de Papa Semba Diop dit Mba, leader du Star Band de
Dakar, le Super Diamono compose un morceau que le jeune Youssou, de sa voix si
particulière, doit interpréter lors d'un concert de soutien à sa famille à
Saint-Louis. C'est un véritable succès.
Après
ce premier essai, le Diamono est invité à se produire à Banjul en Gambie. Ne
prévenant pas son entourage, Youssou est considéré comme fugueur. A son retour,
son père le sermonne et une véritable explication a lieu. Finissant par
convaincre son père de sa vocation, Youssou intègre l'Institut des Arts de
Dakar. Il y apprend entre autres le solfège.
En 75, Youssou N'dour
rejoint un nouvel orchestre nouvellement engagé par un club réputé de la
capitale, le Miami. En raison de son jeune âge, c'est le père qui négocie son
contrat avec le maître des lieux, Ibra Cassé. Il y reste jusqu'en 79, date à laquelle il monte avec un autre chanteur,
El Hadj Faye le groupe l'Etoile de Dakar, la direction
d'orchestre étant réservée à Badou Ndiaye. Il démarre en trombe avec le
tube Xalis (l'argent). En 81, les deux
chanteurs ne s'entendant plus très bien, Youssou quitte le groupe et en reforme
un autre, le Super Etoile. Tout lui réussit. Il est l'incontestable n°1 des
hit-parades dans le genre mbalax. Comme les griots dont il descend, il chante
la vie quotidienne, l'amitié, ou les fêtes religieuses. Mais sa grande réussite
semble être l'invention d'une nouvelle danse qui fait fureur dans les clubs de
la capitale sénégalaise, le "ventilateur". Le tout sur une musique
mélangeant rythmes traditionnels et instruments modernes. Quelques tubes, Wala walo, Nadakaro
ou Indépendance sont la base de son succès. La
production de ses albums (souvent distribués en cassette) se fait aux Editions
Madingo.
Sa voix légèrement cassée, son autorité au sein de son groupe et son
charisme grandissant font de Youssou, le nouvel ambassadeur de la musique
sénégalaise. A l'âge de 24 ans, le jeune homme est déjà un homme d'affaire
avisé, à la tête d'une véritable entreprise qui emploie musiciens, managers,
secrétaires … Il est aussi propriétaire du Thiossane, le club où le groupe se
produit quand il n'est pas en tournée. Enfin, il soigne son image, celle d'un
bon musulman qui ne boit pas ni ne fume. Fils exemplaire, il vit avec ses
parents dans le quartier de la Médina à Dakar, qui l'a vu grandir.
Si
les pays de l'Afrique de l'Ouest accueillent la nouvelle star sénégalaise comme
un des leurs, la tournée européenne qui débute en mai 84 semble plus difficile.
Elle débute à Paris par l'Africa Fête, festival culturel africain
qui pour une soirée accueille les pionniers de l'afro-rock, Osibisa et Youssou
N'dour. Le 18 mai 84, ce dernier fait donc un triomphe non seulement devant ses
compatriotes immigrés (qui avaient eu l'occasion de le voir à Paris dans un
club quelques mois auparavant) mais aussi devant le public parisien.
L'événement se passe à l'Espace Ballard et dure trois heures. La tournée se
poursuit en Allemagne, en Angleterre, en Suède, en Finlande, en Norvège et en
Suisse. En France, il prend contact avec le label Celluloïd et lui confie ses
intérêts.
Revenu
en Afrique, Youssou N'dour entreprend avec le Super Etoile une nouvelle tournée
africaine, de la Mauritanie à la Côte d'Ivoire. Artiste ambitieux, il désire
faire écouter sa musique et ses chants en wolof au plus grand nombre. Il
retourne en France pour le Festival du Printemps de Bourges en 85, joue en
première partie du chanteur Jacques Higelin avec le guinéen Mory
Kanté dans l'immense salle de Bercy du 12 septembre au 12 octobre à Paris
et revient dans la capitale française en décembre pour une semaine de concerts
en vedette au Théâtre de la Ville. A cela doit s'ajouter sa participation au
disque Tam Tam pour l'Ethiopie, à
l'initiative de Manu Dibango, pour le soutien à la lutte contre la
famine dans ce pays. Le voilà donc sur tous les fronts musicaux ce qui ne peut
que contribuer au développement de sa carrière internationale.
Après
une nouvelle série de concerts à Paris au Théâtre de la ville en mars 86,
"You", idole au Sénégal devient un véritable ambassadeur de la
musique africaine et va défendre ses couleurs jusque de l'autre côté de
l'Atlantique, aux Etats-Unis et au Canada, trois semaines durant. Le succès est
à nouveau au rendez-vous et des journaux comme le magasine américain Time
ne tarissent pas d'éloge devant la performance musicale et scénique du
"showman". Rencontré pour la
première fois en 84, Peter Gabriel devient vite un ami de Youssou. Il
l'embauche d'ailleurs pour faire la première partie de sa tournée américaine
avec deux dates mémorables au Madison Square Garden de New York en 87. Sur la
lancée, ils font le tour de l'Europe suivant le même principe.
C'est
au cour d'un véritable périple mondial en 88 avec des stars comme Sting,
Peter Gabriel, ou Tracy Chapman, que Youssou N'Dour accède à la
cour des grands. Les concerts sont donnés au profit d'Amnesty International.
Cette aventure dans laquelle il s'est engagé sans vraiment se rendre compte de
l'impact, a métamorphosé son image, de gloire nationale, il devient vedette
planétaire.
Toujours
aussi apprécié dans son pays, il entreprend une tournée qui rassemble 4000
spectateurs à Rufisque, 3000 à Rosso, 4000 à Kaolack ou Zinguichor; et quelques
milliers à Nouakchott en Mauritanie. L'"Enfant chéri de la Médina"
réussit à cette occasion à réunir quelques quarante techniciens et musiciens,
accompagnés d'énormes camions transportant le matériel (alors que les routes ne
sont pas toujours praticables). Youssou N'dour semble déterminé à montrer son
professionnalisme malgré les difficultés de logistique. En 1989, sort son
premier disque pour le marché international. Signé chez Virgin, The lion
("Gaiendé" en wolof) est un album dont les coûts de production sont
très importants. Si le mbalax est toujours le moteur essentiel de sa musique,
il est accommodé ici de nappes de synthés, et d'arrangements sophistiqués
dignes de studios de haute technologie. Peter Gabriel est invité pour un duo Shakin' the tree, et joue les grands conseillers
es-production. Si certains aficionados de "You", commencent à parler
de dénaturation de sa musique, d'autres voient dans ce disque les débuts de la
fusion africaine.
En même temps qu'une tournée européenne qui passe par Paris le 2
novembre 90 à l'Olympia, Set le deuxième
album chez Virgin, sort en octobre (alors qu'il était sorti en décembre 89 sous
forme de cassette au Sénégal). Si le Super Etoile de Dakar forme le noyau
central des musiciens, quelques treize autres viennent s'y ajouter et
introduisent ainsi des sonorités nouvelles (accordéon et violoncelle) même si
l'instrument fétiche, le tama (petit tambour d'aisselles) reste la star des
instruments. Sans changer d'optique par rapport au précédent album, Youssou
donne là toute la mesure de son talent en révélant une richesse musicale
considérable. Si dans l'univers de la world music, les échos sont
extrêmement favorables, les ventes de disques semblent insuffisantes pour le
label Virgin qui en avril 91, décide de ne pas renouveler le contrat de Youssou
N'Dour.
A
l'occasion d'un show-hommage à Nelson Mandela à Dakar en 91, l'artiste invite
Spike Lee, réalisateur noir-américain à venir y assister. Alors que Youssou est
en rupture de maison de disques, ce dernier le contact un peu après pour
produire un nouvel album. C'est Eyes Open
qui sort au printemps 92. Enregistrés à Dakar avec son groupe et Jean-Philippe
Rykiel dans un studio très moderne qui appartient à Youssou, les quatorze
titres sont chantés en anglais, wolof et français. Les sections de cuivres et
le mixage se font à New York. Africa remembers dédiée
à la diaspora noire est la chanson qui est choisie pour être le support du clip
de lancement, réalisé évidemment par Spike Lee.
En juillet de la même
année, il reprend une tournée en France qui passe par le Bataclan à Paris les
15 et 16 octobre. Mais c'est l'année suivante, qu'il marque un grand coup en
montant un spectacle véritablement créatif : en effet, le 17 juillet, à
l'occasion du Festival Paris Quartier d'été, l'Opéra de Paris (Garnier) ouvre
ses portes à Youssou N'Dour pour « Africa Opera" fresque autour de
l'identité africaine avec la participation d'Angélique Kidjo, Aïcha Kone et
Djanka Diabaté. Ce type de prestation est peu fréquent dans le temple de l'art
lyrique et rend l'événement exceptionnel. De
son propre aveu, Youssou estime que sa musique tarde à s'imposer à l'étranger.
Pourtant avec le simple intitulé "Seven Seconds" chanté en duo avec
Neneh Cherry mais sans consonance africaine, il se fait plus largement
connaître du grand public, amateur généralement de musique anglo-saxonne.
Véritable carton commercial à travers le monde (1.500.000 exemplaires vendus),
le titre lui permet une percée dans le domaine de la variété internationale.
En
94, Wommat" Le Guide est vite
classé dans les charts européens, preuve que la star sénégalaise a enfin
conquis les marchés extra africains. On trouve une reprise de Bob Dylan, Chimes of Freedom et Undicided,
le simple remixé par le duo français Deep Forest. Youssou se veut ici le guide
musical de ses aficionados dont le nombre grandit au fur et à mesure des
tournées qu'il effectue régulièrement en Europe et en Afrique de l'Ouest.
Toujours entreprenant, le "Prince du Mbalax" s'aventure dans le monde
traditionnel des griots africains (dont il est un descendant) et leurs rend
hommage en chantant avec Yandé Codou Sène, grande personnalité de la
scène sénégalaise sur un album Voices of the Heart
of Africa. Chansons traditionnelles et ballades sont au programme de
ce disque magnifique, co-produit avec le label allemand, World Network en 96.
Le 20 septembre, il décroche avec Papa Wemba, le prix du "meilleur
artiste africain" des premiers Trophées de la musique africaine organisés
en Afrique du Sud.
En 97, les deux artistes s'associent pour le compte du Comité
International de la Croix Rouge, avec d'autres musiciens africains pour une chanson
So why?, composé par Wally Badarou et
qui appelle à la réconciliation de l'Afrique. Mais l'événement est sans
conteste la participation artistique de Youssou N'dour à la Coupe du Monde 98
de football en France.
Le
titre la Cour des grands avec la chanteuse
belge Axelle Red comme choriste exceptionnelle, est retenu comme hymne
par Michel Platini, responsable de l'organisation de cette grande
manifestation. Passionné de football et internationalement reconnu, Youssou
N'dour élargit encore son image. Cette année-là, on l'entend également sur
l'album d'Alan Stivell, 1 Duar. Mais si
aucun nouvel album n'apparaît dans le paysage musical international, Youssou ne
sort pas moins de quatre cassettes au cours de l'année 98. Au printemps 99, il
donne un concert exceptionnel sur la scène new-yorkaise du Hammerstein Ballroom
au cours duquel Stevie Wonder fait une apparition mémorable.
Devenu
star, chacun de ses disques est attendu avec beaucoup d'intérêt. C'est le cas
de Joko (From Village to town) qui après
de long mois de maturation voit enfin le jour en février 2000. Pour le marché
international, Youssou déploie les grands moyens. Sur cet album, il y a Wyclef des Fugees qu'il a rencontré à Londres
et qui a travaillé sur trois titres. Il y a aussi Peter Gabriel et Sting
qui viennent apporter leur contribution en chantant sur un titre chacun. Finalement,
la musique du chanteur sénégalais s'apparente à une pop de facture
internationale, que celui-ci ne renie d'ailleurs pas du tout.
C'est
cette double casquette de chanteur traditionnel et de chanteur international
que Youssou N'Dour souhaite mettre en avant lors du Grand Bal qu'il donne à
Paris Bercy le 21 octobre 2000. Il organise même la venue à Paris d'une partie
de ses fans sénégalais. Composé de deux parties, le spectacle présente d'abord
une série de duos de l'artiste avec des chanteurs aussi variés que Cesaria
Evora, Zazie, Passi ou Peter Gabriel. Puis après une
longue pause, c'est le moment du grand bal qui dure toute la nuit.
Chanteur
et musicien remarquable, homme d'affaire avisé, la star sénégalaise multiplie
les activités et semble vouloir occuper tous les terrains de la création
musicale. S'il produit d'autres artistes comme Cheikh Lô, c'est pour favoriser
le mouvement artistique africain, pour l'aider à le structurer et lui donner
une chance de réussir le crossover. Vaste entreprise qui ne fait pas
peur à l'"Enfant de la Médina" ! Février 2001, notre chanteur
s'associe au HCR (Haut Commissariat des nations unies pour les Réfugiés) pour
enregistrer un album dont les fonds financeront des projets dédiés à
l'éducation d'enfants réfugiés. Ensemble, et avec le concours de musiciens dont
la vie est marquée par l'exil et le déracinement, ils réalisent Building Bridges.
En
octobre 2002 sort l'album Nothing's
in Vain qui rend hommage à sa terre sénégalaise et à sa langue
natale, le wolof. Les instruments traditionnels ne sont pas oubliés dans cet
opus feutré où l'on retrouve les sonorités de la kora, du balafon ou du xalam.
Néanmoins, le titre qui fait sensation et qui est l'objet du premier single est
So Many Men, un duo avec Pascal Obispo.
Celui-ci est d'ailleurs le compositeur de deux autres titres sur cet album
: Africa dream Again et Joker. Autre clin d'oeil à la France : la reprise d'un titre de Georges
Brassens, Il n'y a pas d'amour heureux.
Une
tournée européenne démarre le 31 octobre au festival des Docks du sud à
Marseille et passe le 10 novembre par l'Olympia de Paris où il est rejoint sur
scène par Pascal Obispo et Eric Serra, qu'il avait connu à ses débuts lors de
ses premiers spectacles parisiens avec Jacques Higelin au palais
omnisports de Paris Bercy.
Youssou
N'Dour fête Noël, comme chaque année à Dakar, par un grand concert au stade
Demba Diop. Toujours basé dans la capitale sénégalaise, le musicien a besoin de
se ressourcer chaque fois qu'il le peut dans son pays d'origine, et de
retrouver sa famille : sa femme Mamie Camara avec qui il est marié depuis
1990 et leurs quatre enfants.
En
mars, il doit entreprendre une grande tournée nord-américaine qui est
censée le mener dans 38 villes du 26 mars au 15 mai dans 38 villes, mais
il annonce le 7 mars l'annulation de celle-ci pour des raisons
politiques liées à son désaccord avec les Etats-Unis sur la crise irakienne. On
retrouve Youssou N'Dour le 31 mai sur la scène du Palais Omnisports de
Paris-Bercy. Le 9 août, c'est à Dakar qu'il recrée l'ambiance de la grande fête
parisienne.
Novembre
2003 voit la sortie sur le marché sénégalais d'une cassette intitulée Sant Allah, composée de morceaux acoustiques et
mystiques, éloignés de son répertoire habituel. Pour cela, il a fait appel à un
orchestre égyptien et à l'arrangeur Fati Salama. Musulman soufi, le
chanteur sénégalais prouve ainsi son attachement à ses racines, à la tradition
spirituelle héritée de sa mère tidiane et de son père mouride, à l’enseignement
des grands cheikhs marabout du Sénégal.
Le
22 mai 2004, Youssou N'Dour donne un grand bal à Paris-Bercy avec le Super
Etoile. En même temps, sort sur le marché international le disque Allah-Egypte, la version CD de Sant
Allah. Il joue ce nouveau répertoire au Festival des Musiques sacrées de
Fès, au Maroc (28 mai-5 Juin), puis entame une longue tournée américaine.